« 30 ans après la réunification: un état mais toujours deux pays »

« 30 ans après la réunification: un état mais toujours deux pays »

Le 9 novembre 1989 est une date symbolique pour la population allemande, elle marque la chute inattendue du mur de Berlin, qui sépara pendant 28 ans l’Allemagne en deux. En effet ce “ rideau de fer” ,comme l’appela le premier ministre du Royaume-Uni Winston Churchill, coupa non seulement en deux le pays avec à l’Ouest la République Fédérale d’Allemagne (RFA) et à l’Est la République Démocratique d’Allemagne ( RDA) mais aussi l’Europe, avec d’un côté les etats de l’Ouest tournés vers le “monde libre”, et de l’autre le bloc de l’Est, désignant l’ensemble des états communistes tournés vers l’Union soviétique.

  Cependant, il faudra attendre près d’un an après la chute du mur, le 3 octobre 1990, pour que le pays soit officiellement réunifié. Bien que l’écart entre régions de l’Ouest et de l’Est de l’Allemagne ait diminué en 30 ans, la frontière imaginaire persiste.

D’une part, on peut constater que bien que les salaires de l’Est soient en nette progression, ils restent inférieurs à ceux de l’Ouest. Le salaire mensuel moyen en Allemagne de l’Ouest est de 3.340 euros contre 2750 euros à l’Est. De même, la croissance économique est plus forte dans les régions de l’Ouest que dans celles de l’Est.

Aucune des grandes entreprises allemandes cotées en bourse ne possèdent son siège à l’Est.
 N’aidant en rien la croissance de leurs régions, les jeunes qualifiés “de l’Est”, du fait d’une situation économique peu prometteuse, migrent vers l’Ouest ( le taux de chômage s’élève à 6,9 % à l’Est contre 4,8 % à l’Ouest). De ce fait, on observe une désertification du territoire, surtout rural, un ralentissement démographique,et un vieillissement de la population plus rapide qu’à l’Ouest.

Ainsi, les habitants de l’Est se sentent comme des habitants de seconde zone, délaissés par les allemands de l’Ouest et les hommes et femmes politiques de Berlin. Ce mécontentement va, en partie, engendrer un phénomène qui inquiète les partis traditionnels allemands, et plus globalement l’Europe : l’émergence de l’AFD (Alternative Für Deutschland), parti d’extrême droite fondé en 2013, souvent qualifié comme “antidémocratique”, “ antisémite” et “ raciste”, qui perce plus fortement à l’Est. Ainsi l’AFD est arrivée deuxième à la dernière élection régionale dans le Land de Saxe derrière la CDU, le parti de l’actuelle chancelière Angela Merkel.

Si le mur physique fait de béton a disparu entre Est et Ouest, un mur de verre économique l’a remplacé.

par Tara Querol-Eisenack